Bâtir Montréal à la table 45. Laurence Vincent, Septentrion, 2018, 168 p.
On continue sur notre lancée, commencée la semaine dernière, à propos de la promotion immobilière. Mais cette fois, en empruntant le chemin bien particulier de la voix autobiographique, par filiation interposée. À défaut de lire le récit de la croissance d’un des grands de la promotion immobilière à Montréal, c’est par la voix d’une de ses filles, Laurence Vincent (maintenant co-présidente du groupe Prével) que l’on en découvre un peu plus sur ce groupe, mais surtout sur son fondateur, Jacques Vincent, le père en question.
Parce qu’avant toute chose, ce livre est une très sympathique lettre d’amour d’une fille à son père. C’est à travers le regard de cette fille qui grandit naturellement dans ce milieu, et s’approprie presque malgré elle des rouages de l’entreprise de son père que nous découvrons les risques considérables des premières années, jusqu’au développement de la philosophie urbaine « gagnante » pour le groupe.
Contrairement au livre de la semaine dernière, il n’y a personne qui pourra affiner ses talents ou se lancer dans le monde de l’immobilier urbain en parcourant ces pages, et c’est très bien ainsi. Et même si la « mécanique » et les différents « montages » nécessaires dans la réussite de la vente des logements résidentiels ne sont pas son propos, l’auteure ne pouvait faire autrement que d’évoquer quelques-uns de ses apprentissages. On y trouvera ainsi l’exposition de la « sauce spéciale à la Prével » qui serait, selon l’auteure, au cœur de la formule qui a fait ses preuves pour le groupe. Elle se résume en la création, dans chacun de leurs immeubles (souvent des reconversions de bâtiments industriels existants), de généreux espaces de vie en commun pour les acheteurs des unités résidentielles. C’était avant la pandémie actuelle.
L’ensemble du récit reflète une simultanéité de point de vue et de repère qui sont eux-mêmes riches en observation nouvelle. Pour le lecteur neutre ou bienveillant de sa narration autobiographique, il n’est pas toujours certain que l’auteure elle-même maîtrise tout à fait les tonalités disparates qui ressortent, mais il faut bien admettre que cela est tout à fait congru avec la formulation « lettre d’amour paternelle » qui imprègne dignement son récit.
Sur les traces de Bâtir Montréal à la table 45
C’est en parcourant les pages d’un numéro de la revue de notre ordre professionnel, Urbanité, que je suis tombé pour la première fois sur une mention de ce livre ; acheté le week-end même à La librairie de Verdun, celle de notre quartier (s’était avant la pandémie).
Par la nature essentiellement autobiographie du récit, on pourra comprendre qu’il n’y a pas une longue épistémologie à suivre. Un auteur toutefois, Edward Glaeser, a laissé sa marque de manière assez vive sur Madame Vincent pour qu’elle cite à deux reprises des passages de son fameux Triumph of the City. Je vais simplement reprendre le premier passage cité, puisqu’il condense assez bien les aspirations et la philosophie que le groupe Prével tente d’insuffler dans son produit immobilier résidentiel (p. 25) : « Greater density is the goal: more people, means more interaction, which means more possibility. We are a social species that gets smarter by being around other smart people, and that’s why cities thrive. » Hear, hear!
En dernier lieu, je tiens à souligner qu’à la dernière page du livre, il y a la mention que « [L]es droits d’auteur issus de la vente de ce livre seront remis à Moisson Montréal. »